Aux abords de Smocky Hill City ft Karine

Karine retint un juron lorsqu’elle buta malencontreusement contre un tas de débris qui s’écroula sur lui même, provoquant un bruit résonant à l’orée des bois. Elle s’immobilisa et regarda autour d’elle. Toujours personne, avec un peu de chance elle n’avait pas alerté les propriétaires du campement.
Quelques minutes plus tôt, durant ses pérégrinations, elle avait atteint la limite de la forêt de ce côté ci. Plus loin, une sorte de petit village fortifié se dressait sous ses yeux. Pas question de s’aventurer là bas donc, c’était trop dangereux.
De toute façon, la chance lui avait sourit en logeant l’orée des bois. Un campement se trouvait à la lisière des arbres. Il semblait récent contrairement au dernier qu’elle avait croisé mais pourtant il n’y avait personne. Karine avait hésité quelques secondes, restant à l’abris derrière un rocher. Puis voyant que personne n’arrivait, avait décidé de se lancer. Avec la discrétion d’un chat, elle s’était faufilé dans le campement et avait commencé à le fouiller. Ce n’était pas tant de la nourriture qu’elle cherchait que de l’eau potable. Grâce aux dons de Aaron, elle avait encore assez de vivres pour presque deux semaines. Malheureusement, concernant l’eau, elle n’avait trouvé que des sources taries ou croupies. Peut être que les rôdeurs les contaminaient ?...
En tout cas, il fallait qu’elle trouve vite de l’eau avant de finir déshydratée.
Motivée par la soif, elle s’était donc mise à chercher dans le camp, sans succès dans un premier temps. Elle n’avait trouvé d’utile qu’un rouleau de scotch et un flacon d’antiseptique en spray. Sa frustration lui avait alors fait perdre assez de concentration pour taper malencontreusement dans une pile de détritus, principalement des canettes et bouteilles vides.

La fillette s’assura de nouveau qu’elle était seule puis, ne voyant personne autour, recommença ses recherches. La chance finit enfin par lui sourire dans un petit tas de sacs de tissus, sans doute destinés au transport. L’un deux contenait une grande bouteille d’eau en plastique pas encore ouverte. Soulagée, Karine décida tout de même qu’il n’était pas prudent d’en boire ici. Aussi descendit-elle son sac à dos de ses épaules pour fourrer sa trouvaille dedans. Puis elle se releva en resserrant les boucles de son sac et se prépara à repartir, satisfaite de ses fouilles. Après tout, ce n’était pas vraiment du vol puisqu’il n’y avait personne non ?

“ Ne bouge pas. Qu'est-ce que tu viens faire ici ? ”

Karine fit un véritable bond sur place sous l’effet de la surprise et fit volte-face, les yeux écarquillés. Un homme se tenait à quelques pas d’elle, droit comme un i, le visage froid et le canon d’un fusil pointé sur le visage de la fillette.
La peur mêlée à la surprise de s’être faite surprendre fit aussitôt accélérer le rythme cardiaque de Karine qui resta figer face à l’inconnu qui la menaçait de son arme. La stupeur la clouait sur place et semblait geler son cerveau, aussi resta t-elle silencieuse face à la question. C’était la première fois qu’elle se faisait prendre sur le fait lors d’un vol dans un campement de survivants. D’habitude, elle était toujours très discrète. Mais la fatigue et la soif lui avait fait faire des erreurs…
Devant son manque de réaction, l’homme inspira profondément, comme s’il se préparait à la suite, et lança son prochain ordre d’un ton sec et autoritaire :

“ Lève tes mains en l'air sans geste brusque. ”

N’importe quel humain en accord avec son instinct de survie aurait obéit à cette invective. Néanmoins, Karine ne s’était jamais faite menacer d’une arme et la seule chose qui occupait son esprit à cet instant était la peur qui électrifiait son esprit. Elle se rappelait le dernier homme qui avait un visage aussi froid : celui qui avait voulu la tuer dans le camping car.
La peur atteignit alors son système nerveux, réactivant ses muscles comme sous l’effet d’une décharge. Dans un réflexe parfaitement stupide, elle tourna alors vivement les talons et prit la fuite aussi vite que ses jambes pouvaient la porter, courant sans réfléchir vers l’abris des bois. Elle n’avait qu’une idée en tête : s’enfuir le plus rapidement possible, fuir cet homme qui l’effrayait par sa voix et ses intentions inconnues.
En faisant cela, elle ne réalisait pas un seul instant que sur ce terrain dégagé, elle devenait une cible parfaite pour l’homme armé.

H.S:

BLAM !

La détonation retentit en même temps que la balle ricocha à quelques mètres de Karine. Le tir n’avait pas pour but de la toucher, ou alors l’homme était un sacré mauvais tireur, mais ce n’est pas ça qui stoppa Karine. La surprise du coup de feu semblable à un coup de tonnerre lui fit manquer un pas et elle trébucha sur un pied de l’une des tentes pour tomber en avant.
Un peu secouée elle tenta immédiatement de se relever, poussée par l’angoisse. Mais déjà son agresseur était sur elle. Avec force et vélocité, il l’attrapa par le bras et la tira vers le haut pour la remettre debout et l’empêcher de fuir de nouveau.

“ Qu'est-ce que tu as volée ? ” s’exclama t-il agressivement. “ Si tu as survécu aussi longtemps … C'est que tu sais te débrouiller ? Tu pilles les autres ? Tu pensais être discrète ? ”

Réveillée par la peur, Karine se mit à se débattre comme une furie, secoua son bras prisonnier dans tous les sens, à s’en faire mal.

“ Lâche moi ! Lâche moi ! ” hurla t-elle.

Elle tira fort sur son bras, mais l’homme avait plus de force qu’elle, et la panique rendait ses propres mouvements anarchiques.
Son agresseurs, sans doute agacé par le fait qu’elle en lui réponde pas et hurle à pleins poumons saisit alors son sac à dos et lui arracha des épaules. Il recula, lâchant la fillette qui, emportée par son élan, retomba au sol. Ses yeux écarquillés se fixèrent sur l’homme qui fouillait à présent dans son sac à dos.

“ Tu as pris que ça ... ” dit il alors en lui lançant un regard entre la colère froide et l’étonnement.

Karine de son côté n’avait qu’une idée qui obsédait son esprit à présent : il venait de lui prendre son sac, son seul bagage qui contenait ses seules possessions. Son briquet, ses quelques vivres, sa peluche… Figée sur place, fixée sur l’homme, elle changea alors doucement d’expression. La peur qui marquait son visage disparut pour laisser la place à son tour à une profonde colère.
Sans prévenir, elle se redressa soudain d’un bond et se jeta sur le voleur en hurlant.

“ Rend moi mon sac ! ”

Devenue d’un seul coup une véritable furie enragée, elle sauta au cou de l’homme au fusil. La force soudaine de son attaque couplée avec la surprise de son adversaire les firent tomber tout les deux et rouler au sol.
En une demi-seconde, ils se retrouvèrent étalés sur le sol de terre, Karine frappant de ses petits poings et de toute sa rage tous les endroits qu’elle pouvait atteindre chez son adversaire et ce dernier devant faire de son mieux pour esquiver ou arrêter les dizaines de coups de la petite furie qui pleuvaient sur lui sans interruption.

“ Personne… touche… à mon… sac !! ” hurlait Karine entre deux attaques.

Elle avait oublié toute notion de prudence, emportée par sa colère. Cette même colère accumulée depuis des mois contre les humains, contre les assassins de sa mère, contre ceux qui lui avaient fait perdre tous ses repères et la faisait vivre à présent dans la peur et la solitude.

Néanmoins, alors que les deux luttaient l'un contre l'autre, au même moment plusieurs silhouettes commencèrent à se rapprocher, sortant de la forêt. Des silhouettes attirés par les bruits d'affrontement des deux humains. Des silhouettes qui grognaient d'un air affamé et progressait lentement de leur démarche grotesque vers la source de tout ce bruit...

HS: